“Les sans-papiers sont de la chair à patron”

Rencontre avec Elsa Faucillon, députée PCF des Hauts-De-Seine.

Les Dreamers : Quel soutien pouvez-vous apporter aux salariés sans-papiers de RSI ?

Elsa Faucillon : Dans les premiers temps, en plein mois de l’hiver, il fallait faire en sorte qu’ils n’aient pas froid, qu’il y ait aussi de temps en temps des repas solidaires, des repas chauds, mais aussi qu’ils aient accès à des toilettes sur place. Ensuite, nous avons commencé un bras de fer avec la préfecture et avec l’agence d’intérim, RSI. Le fait de les soutenir, concrètement, sur place, cela permet un rapport de force vis-à-vis de l’entreprise. On est présent aussi à chaque fois qu’ils font un rassemblement.

Est-ce fréquent que des travailleurs sans-papiers se mettent en grève ?

Des grèves, il en existe beaucoup. J’étais hier par exemple avec les salariés de la Segma (Gennevilliers, 92) mais pour des raisons de conditions salariales, des conditions de travail et de salaires. Des grèves il y en a donc très régulièrement. Des grèves de travailleurs sans-papiers aussi, mais elles sont souvent invisibilisées.

Moi, j’ai commencé mon engagement politique avec des grèves des sans-papiers en 2006-2007. Il s’agissait des premières grandes grèves, qui ont permis à la France de découvrir les patrons-voyous mais aussi les salariés sans-papiers, qui font tourner le pays. La crise du Covid a mis un peu plus en lumière ces travailleurs. Mais je dirais qu’après ce moment de lancement en 2006-2007, qui a permis de mettre en avant cette situation, les grèves de sans-papiers peinent aujourd’hui à être visibilisées. Quand elles le sont, la plupart du temps, elles sont instrumentalisées pour avoir des propos xénophobes. C’est donc important qu’il y ait des soutiens, y compris des politiques, qui puissent les accompagner sinon ils sont très isolés dans leur lutte.

A l’Assemblée Nationale, quels projets de lois avez-vous déposés ?

Par exemple au moment de l’horrible loi « Asile et Immigration » (en 2018), nous avons été plusieurs à porter l’idée qu’il fallait une régularisation massive de toutes celles et tous ceux qui travaillent, qui sont sur le territoire et qui ne repartiront pas. Il y a une hypocrisie à les garder dans la clandestinité. Ce sont de la chair à patron qui est offerte par l’Etat.

C’est aussi pour ça qu’on est là. Pour dire : l’Etat doit prendre ses responsabilités.

Propos recueillis par Orian Lempereur-Castelli